Le voici le petit troisième de la sélection du mois d’avril du Prix des Lecteurs 2020 organisé par Le Livre de Poche. Il me tardait de vous en parler. Avec Le Douzième Chapitre, Jérôme Loubry nous fait plonger dans deux univers que j’affectionne plus particulièrement : celui de l’enfance et celui de l’écriture et quand le tout se déroule en Vendée, en bord de mer, l’équation est parfaite pour me faire passer un délicieux moment.
Résumé :
Été 1986. David et Samuel ont 12 ans. Comme chaque année, ils séjournent au bord de l’océan, dans le centre de vacances appartenant à l’employeur de leurs parents. Ils font la connaissance de Julie, une fillette de leur âge, et les trois enfants deviennent inséparables. Mais une ombre plane sur la station balnéaire et les adultes deviennent de plus en plus mystérieux et taciturnes. Puis alors que la semaine se termine, Julie disparaît. 30 ans plus tard, David est devenu écrivain, Samuel est son éditeur. Depuis le drame, ils n’ont jamais reparlé de Julie. Un jour, chacun reçoit une enveloppe. À l’intérieur, un manuscrit énigmatique relate les évènements de cet été tragique, apportant un tout nouvel éclairage sur l’affaire.
Raviver de vieux souvenirs et remonter le fil de la culpabilité
Tout commence donc à Saint-Hilaire-de-Riez en 1986. C’est l’été. Jérôme Loubry nous plante immédiatement le décor à travers les yeux de trois enfants : David, Samuel et Julie. Leur seul préoccupation comme nous a leur âge, se retrouver sur la plage, explorer les environs, inventer des histoires et se faire le plus petit possible que le temps s’effile jusqu’à l’infini. En parallèle, nous débarquons en 2017 chez David. Il est devenu écrivain, vit dans une maison en bord de mer, une maison d’architecte, avec de grandes vitres donnant directement sur les vagues. Samuel est devenu son éditeur.
Le duo reflète la réussite et nous pourrions presque les envier. Mais tout part à la dérive, quand les deux amis reçoivent un pli avec à l’intérieur un manuscrit. Ce manuscrit anonyme relate leur été, celui de 1986, un été sur fond de liquidation de l’usine où travaillent leurs parents, un été où les fantômes et les pirates resurgissent, où la révolte ronge les tripes des ouvriers besogneux craintifs de perdre leurs emplois … L’été d’une disparition. L’été de deux disparitions. En 1986, David et Samuel n’étaient que des enfants. Aujourd’hui, cette histoire est derrière eux et pourtant. Les douze chapitres qu’ils vont lire les uns après les autres et que Jérôme Loubry nous livre en italique dans le texte vont leur permettre de raviver de vieux souvenirs et de remonter le fil de la culpabilité.
J’avais dix-huit ans. Un âge égoïste. Un âge où l’on fuit les murmures de l’enfance. Où l’on devient sourd. Jusqu’à ce que les murmures des souvenirs évanouis ne reviennent nous hanter, des années plus tard.
Les pièces du puzzle s’imbriquent petit à petit et les auteurs potentiels de ce manuscrit éliminés au fur et à mesure des pages jusqu’à ce que se dessine une silhouette à laquelle nous pensons au détour d’un chapitre mais sans trop y croire. Le douzième chapitre c’est une histoire d’enfants, d’espoir de gosses, d’âmes naïves qui grandissent trop tôt, c’est aussi une histoire de famille, de deuil, de non-dits qui croupissent dans des flaques d’eau qu’on ne prend plus la peine de regarder. J’ai adoré le point de départ choisi par Jérôme Loubry, celui d’un écrivain qui reçoit un manuscrit dans le lequel il est l’un des personnages principales. I
Il a vécu chacune des lignes relatées et pourtant ne les a pas écrites. Plus David s’enfonce dans l’angoisse de ses souvenirs, plus la sueur perle sur notre front de lecteur. Nous trépignons avec lui, nous stressons avec lui, et puis tiens, nous aussi nous aurions bien besoin d’un verre de whisky pour tranquilliser nos neurones !