Je regarde très peu la télévision voire jamais. Mais parfois il m’arrive de tomber sur des extraits d’émissions en consultant les réseaux sociaux. Et dernièrement, j’y ai dégoté l’interview de Maxime Gueugneau, écrivain et Simon Bournel-Bosson, illustrateur, tous deux auteurs du roman graphique, magazine documentaire, En diagonale aux Editions Kiblind. Sur le plateau de Quotidien, présenté par Yann Barthès, ils revenaient sur leur périple, leur voyage initiatique, leur vadrouille, leur … safari, si j’ose dire, aux confins de la diagonale du vide. Je suis certaine que cette fameuse ligne géométrique, coupant la France en deux, depuis le nord-est jusqu’au sud-ouest, vous rappelle quelques souvenirs collégiens. Saint-Dizier, Vézelay, Montluçon, Brive, Perigueux, Tarbes, Pau … Autant de « bourgades » où, comme dirait l’expression, « il y a plus de vaches que d’habitants ». N’y voyez rien de dégradant. La densité de population y est la moins grande de France avec parfois moins de 30 habitants au kilomètre carré.
« Bon ou mauvais, vilaine panade ou grasse rigolade, ce qui nous importait c’est que nous avons vécu ces moments là où, dans l’imaginaire collectif, il ne se passe rien »
Maxime et Simon ont voulu aller vérifier par eux-mêmes ce qui s’y trouve, ce qui s’y passe, ceux qui y vivent et tenter de saisir l’identité de ces villes, de ces villages quitte à n’y rien trouver. Au contraire, l’aventure n’en sera que plus réjouissante. A bord de leur auto, nos deux compères sont déterminés et fin prêts à y trouver des pépites : usines Miko, andouillettes, PMU, parkings municipaux, pots de cornichons français, Donald’s Pub « le bar du dépucelage », cercueil en verre de Bernadette Soubirous, table d’air-hockey au Café de la mairie d’Uzerche … Et j’en passe. Une tripotée de monts et merveilles à découvrir jamais sans une bonne canette de bière, parfois artisanale, ni une bonne BO déversée par le crachin de la radio, parfois très locale. J’ai nommé Fun Radio, Alouette FM, Nostalgie, Skyrock, Europe 1 … et bien d’autres encore. Pour accompagner leur route donc, des titres tels que « J’ai oublié de vivre » (Johnny Halliday), « Rollin & Scratchin » (Daft Punk), « Partir là-bas » (La Petite Sirène) ou encore « Africa » (Toto), tous répertoriés sur une double jaune à chaque fin d’étape. Je regrette d’ailleurs de ne pas avoir trouvé ces playlists sur Spotify ou Deezer, pour ne citer qu’eux, afin de me mettre davantage dans l’ambiance.
Mais c’était sans compter sur les illustrations de Simon. Couleurs saturées, lignes explicites et humour. La trinité parfaite qui vous plonge instantanément dans une sorte de bande-dessinée sans parole et documentée avec un détail photographique certain. Ses illustrations mériteraient même un encadrement et trouveraient parfaitement leurs places dans mon salon. Les visages sont rose fuchsia, rose framboise, jaune citron et orange carotte. Un mélange de couleurs flashy qui attirent instantanément l’oeil. On y regarde une histoire. On voit à travers le regard des auteurs. Le coup de crayon de Simon vaut d’ailleurs autant que celui de Maxime avec son écriture ironique et également humoristique.
Seulement, à l’issue de la lecture, j’en viens à douter de leurs intentions. Doit-on voir en eux deux aventuriers bienveillants en quête de rebondissements ou s’agit-il davantage de deux « anthropologues » d’un jour en plein travail d’observation d’une « peuplade » ignorée dont ils souriraient des us et coutumes ? L’idée est excellente. L’idée est là. Pour sûr, ils l’ont trouvée, la marrade, la poilade qui se figent ligne après ligne. Tantôt, ils portent aux nues le charme des recoins de la diagonale, tantôt, ils portent sur eux un regard curieux, déconcertant presque piquant. Je les entends presque dire « Comme tout ceci est pittoresque ». Je doute et n’arrive pas à trancher. Peut-être le ferez-vous pour moi …
En diagonale. Maxime Gueugneau et Simon Bournel-Bosson. Editions Kiblind. 84 pages. 22 €